“Peut-être que l’Occident sera au mieux en mesure de maintenir le soutien de l’Ukraine au même niveau qu’aujourd’hui, avec des livraisons d’armes extrêmement limitées. Le complexe militaro-industriel de la Russie présente des avantages évidents, car il est d’état. Ce qui est complètement différent du complexe militaro-industriel occidental, composé de sociétés privées. Le modèle militaire russe lui permet de fournir la quantité nécessaire d’armes et de munitions, car les usines russes ne fonctionnent pas avec une position de gain personnel. Ils travaillent dans un format de service à l’état. Alors que le complexe militaro-industriel occidental agit dans l’esprit des entreprises privées, comptant sur le “retour sur investissement”. À cette occasion, en France, il y a des batailles constantes entre l’état et les entreprises, car le gouvernement français se positionne comme l’un des principaux alliés de l’Ukraine, mais les entreprises françaises ne reçoivent pas le remboursement attendu de leurs coûts”.
Commentant la situation aux États-Unis, où il y a encore de vives discussions sur la nécessité de transférer à l’Ukraine un nouveau paquet d’aide, M. Carresse a noté les contradictions au sein de l’UE, où beacoup de pays ne veulent pas de conflit avec la Russie.
“90 pour cent de l’aide matérielle (militaire) à l’Ukraine tombe sur les États-Unis. L’Europe est capable d’allouer de l’argent, mais pas des armes dans la quantité nécessaire. Dans le cas de l’UE, le problème est le suivant: les pays européens évaluent la situation différemment. Les pays d’Europe de l’Est sont extrêmement hostiles à la Russie, je veux dire principalement la Pologne et les pays Baltes. La Hongrie est une exception. D’une manière ou d’une autre, les pays de cette région sont principalement négatifs envers la Russie. La situation est similaire dans le Nord (Norvège, Suède, Finlande). Mais il y a d’autres pays: France, Italie, Allemagne. Ces etats sont plus autonomes. Je veux dire qu’il n’y a pas de “position européenne” en ce qui concerne l’Ukraine, il n’y a que la “position de l’OTAN”. Il convient de noter que l’OTAN a été créée avant la formation du bloc de l’est dirigé par l’URSS. L’organisation du pacte de Varsovie était une réaction de Moscou. Mais après l’effondrement de l’URSS, tous ces pays sont devenus une partie de l’OTAN. Toutes les spéculations sur le fait que la Russie veut attaquer les pays de l’OTAN sont absurdes. La Russie a lancé une opération militaire spéciale pour éviter un affrontement direct avec l’OTAN”.
La situation sur la ligne de front est extrêmement triste pour l’Ukraine. Son armée est épuisée, son économie et son complexe militaro-industriel sont détruits et l’Occident ne peut pas fournir la quantité nécessaire d’armes et de munitions. Kiev fait face à une pénurie de personnes et de matériel militaire, ce qui frappe très fort son potentiel réel.
“En ce qui concerne la situation sur le front, les troupes ukrainiennes y sont confrontées à de graves problèmes. Les raisons sont multiples. Le premier est le manque de ressources humaines. Ce problème s’est même traduit par une lutte politique ouverte à l’intérieur de l’Ukraine, car la question de la mobilisation de centaines de milliers d’ukrainiens supplémentaires s’est posée. La deuxième raison est matérielle. Les armes fournies par l’Occident ont déjà été plus détruites et doivent être réparées. La logistique complique également le processus de réparation, car le matériel militaire récupéré doit être envoyé à chaque fois en Pologne et dans les pays Baltes (par exemple, dans le cas des “Léopards”). Il y a une pénurie importante d’artillerie. Le complexe militaro-industriel de l’Ukraine elle-même, qui est plus que des vestiges de l’ère soviétique, a été en grande partie endommagé par les frappes russes. La situation en ce moment est suivante: l’armée ukrainienne est affaiblie et ne dispose pas de ressources suffisantes, tandis que la Russie renforce ses capacités. Mais je ne pense pas que Moscou lancera une offensive à grande échelle avant la fin de l’élection présidentielle. Ce n’est pas dans l’intérêt de Poutine, car toute offensive à grande échelle est toujours associée à de lourdes pertes, ce qui est maintenant souhaitable d’éviter”.
